Cerceau

Dans une maison de campagne dont il vient d'hériter, Pétouchok réunit de vieilles connaissances. Entre un premier contact embarrassé, pour tenter de retrouver le bonheur d'être ensemble, et l'échec de cette tentative, s'inscrit un mouvement dramatique de toute beauté qui dit la vanité de cette entreprise au fur et à mesure où elle est tentée. L'un des mécanismes en est la lecture recueillie, grave, tendue, de vieilles lettres d'amour retrouvées au fond d'une malle. Cette évocation épistolaire du passé est sans cesse interrompue par les souvenirs qu'elle fait surgir en chacun, avec douleur, crispation, émotion contenue ou détachement feint. Le jeu du cerceau volant apparaît alors comme le fil fragile qui devrait permettre de rattacher le présent au passé mais qui n'y parviendra pas : le tissu des relations amicales qui liaient les personnages offre une trame déjà trop effilochée par le temps, la vie, les moeurs. Sur ce fond de gravité, l'auteur trace une infinité de motifs dans les tons les plus contrastés : la richesse et la diversité de cet alliage délicat ont fait dire de Slavkine qu'il était le Tchekhov de cette fin de siècle. C'est un éloge qui ne devrait pas occulter tout ce que cette grande pièce représente d'absolument inédit.