Étonnant parcours d'existence que celui de Bernard Cordier. Il est d'abord sans faute. Parti de rien ou presque, il devient pilote de chasse puis, après guerre, commandant de bord de ces merveilleux appareils qu'on appelait des Constellations. Cent cinquante fois il traversa l'Atlantique. Il appartient à ce qu'on appelle alors le club des princes de l'Atlantique. Le jeune homme pauvre qu'il fut un moment est au sommet des réussites humaines. Mais il y a au profond de lui une insatisfaction. Un jour de 15 août 1948, il s'enferme dans un appartement parisien par besoin de silence. C'est alors que se produit l'imprévisible : la certitude que Dieu est et qu'il l'aime. Soudain, il décide en retour de lui consacrer sa vie. Cela le conduit à la Trappe de Cîteaux en avril 1950. En février 1956, il prononce ses voeux solennels. Ses anciens camarades, qui ne l'ont pas oublié, déploient leurs appareils en formation au-dessus du monastère, comme le 14 juillet sur les Champs-Elysées. Clin d'oeil d'un passé qui n'est plus au moine qu'est devenu Cordier sous le nom de Baudouin. Une belle histoire d'homme qui montre ce qu'il en est d'une existence quand on la vit à sa mesure. - Robert Masson